« This is OZ, Nothing Makes Sense »
Etrange, ce que ce monde est devenu…
Ces visages indifférents au monde ? visages qui scrutent plutôt. Visages qui observent le monde, observent les hommes, s’observent entre eux, s’observent eux-mêmes. Ils ne jugent pas. Simples témoins du monde, ils semblent se dire « Etrange ! Ce que ce monde est devenu »
Monde étrange où l’on ne sait plus distinguer le faux du vrai, le réel de l’imaginaire, le concret de la chimère. Entouré des innombrables visages de Gumo, on se sent épié par tous, et en même temps on les voit indifférent à tout autre être humain qu’eux-mêmes. Une réalité de la vie urbaine s’impose avec force dans l’œuvre de Gumo, avec une réalité d’une telle violence que la prise de conscience en est presque douloureuse. Enfant urbain, ses œuvres racontent la ville et le monde. Elles transpercent les illusions douces-amères que le monde s’est construit. L’art de Gumo ne fait pas de concession. Il montre notre civilisation telle qu’il la voit, sans préjugé, sans pommade et sans hypocrisie.
Gumo peint tout haut ce que beaucoup mentent tout bas.
Ces visages sont universels. Ces visages sont chacun et tout le monde. Ils évoluent dans le monde et l’observent, stoïques. C’est vous qu’ils regardent, qu’ils observent. Ils ne vous jugent pas mais apprennent de vos rêves, de vos espoirs, de vos craintes et de vos erreurs. Ce sont les leurs. Comme vous, ils sont le fruit du monde d’aujourd’hui. Autant organique que mécanique. Ils réveillent et révèlent le côté animal de l’être humain formaté par la machine qu’il a lui-même construite. Chaleur de l’animal, froideur de la machine. Faillibilité de l’animal, régularité de la machine.
Gumo réunit les contraires. Il ne les oppose pas, il les harmonise, montrent que ces oppositions n’existent que dans les esprits des hommes qui les ont inventé. Il réconcilie aux yeux de tous des opposés qui ne se sont jamais vraiment séparés. Son exposition jette au visage des visiteurs les réalités qu’ils ont enfouis au plus profond d’eux-mêmes pour ne pas les affronter.
Gumo peint tout haut ce que beaucoup enfouissent tout bas.
Le matériau est brut, apparent, puissant, acéré. Et les visages de l’homme apparaissent dans la matière, se fondent en elle comme l’homme a cru pouvoir fondre la matière du monde en lui.
« L’homme est un loup pour l’homme ». Gumo montre dans ses œuvres la réalité concrète et actuelle de cet adage. L’homme est venu au monde. Il a cru que le monde était venu à lui. Il a cru pouvoir le contrôler comme il croit se contrôler lui-même. L’homme croit pouvoir façonner le monde. Gumo montre que c’est le monde qui façonne l’homme qui façonne le monde.
Ce monde est fait de peau et de carton. La peau devient carton, le carton devient peau. L’artificiel et le naturel se mêlent. Autant organique que mécanique.
La matière semble artificielle mais le trait est humain. Le tag est nerveux, le coup de bombe offensif contre la toile. Parfois, un visage pleure de cette violence, dégouline, fond, se décompose, et montre sa fragilité. Car les œuvres de Gumo ne sont pas agressives. Elles sont douces et acides, tendres et acérées. A l’image du monde et des hommes. La bombe fluo y défie l’œil. Elle le provoque, l’incite à la contempler et rejette son regard en même temps. Elle force l’œil à s’ouvrir, à voir le monde. Elle ose, offense et crée la prise de conscience. Acide, elle consume les illusions et les préjugés.
Gumo peint tout haut ce que beaucoup jugent tout bas.
Et dans cette ardeur à dénoncer ce monde, Gumo signe ses œuvres d’espoir. A quoi bon révéler les vices de l’homme si ce n’est pour tenter de les améliorer… dans sa ferveur à révéler les ambivalences du monde, Gumo met au jour ses possibilité d’harmonie. En observant ces êtres qui l’observent, l’homme se voit dans un miroir. Confronté à lui-même, il découvre ses défauts, ses erreurs et ses travers, mais aussi ses faiblesses, ses fragilités, ses douceurs, ses espoirs pour le monde et pour lui-même. Par sa dénonciation d’un monde qui tend à privilégier la haine, Gumo montre son espoir de l’améliorer, son ambition de révéler aux yeux des hommes ce qu’il reste d’amour et de paix.
Gumo peint tout haut ce que beaucoup espèrent tout bas.
Etrange ce que ce monde est devenu. Source de colère, source d’espoir, source d’inspiration.
Irene Guittin.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire